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La campagne Afrique ou du bon usage d'un échec

Par BLION Reynald
Date de la fiche : 1997/09/10.


A l'origine de l'action.

En 1993, la CIMADE organise avec ses groupes locaux et le soutien de l'Union Européenne, une campagne sur l'Afrique intitulée : "Voir l'Afrique autrement". Cette campagne a pour objectif de promouvoir une autre image de l'Afrique et de dépasser les images et représentations trop souvent véhiculées par les médias. Elle repose, entre autre, sur l'organisation d'un concours de dessins qui associe écoles d'art et MJC. Un jury est constitué pour apprécier les dessins et décerner différents prix dont les deux premiers sont un voyage au Sénégal.

Deux éléments ont contribué à promouvoir un travail complémentaire. De l'avis général du jury, les images reçues, qui par ailleurs devaient permettre de constituer une exposition itinérante, étaient de qualité médiocre et peu répondaient à l'objectif général de la campagne compte tenu des stéréotypes, des représentations véhiculées par ces dessins. De plus, les lauréats du concours ont refusé le voyage en Afrique, non par indisponibilité, mais par une sorte d'appréhension très forte à l'idée d'un voyage sur le continent africain. Ces deux éléments donnent une indication claire quant à l'évaluation et la pertinence de cette campagne, compte tenu des objectifs affichés.

L'idée a donc germé de poursuivre ce travail de sensibilisation sur l'Afrique en regroupant les plus représentatifs des dessins dans un livret pédagogique, lequel est devenu le support d'un travail plus large d'animation et de sensibilisation.

L'image comme support d'animation.

Ce travail a un double objectif : promouvoir une formation sur l'approche critique de l'image et faire prendre conscience des stéréotypes, préjugés et représentations véhiculés par l'image, que celle-ci soit dessins, photos ou reportages audiovisuels. Le public visé est celui des auteurs des dessins invités à participer à des séances de formation et de sensibilisation s'appuyant principalement sur le livret pédagogique.

Chaque séance s'articule d'abord autour d'une approche théorique à l'analyse critique de l'image (contenu, objectifs, méthode d'analyse). Ensuite, un travail en groupe de trois ou quatre personnes à partir des images du livret permet à chacun d'exprimer le message qu'il perçoit dans chacune des images, de repérer les représentations et préjugés qu'elle véhicule et de confronter cette analyse avec celle des autres. Un troisième temps est consacré à la restitution globale des échanges en groupe et à la confrontation des analyses. Enfin il est procédé à une analyse plus globale de l'image comme vecteur de représentation de l'autre afin de faire prendre conscience aux stagiaires de leur propres stéréotypes et préjugés à l'égard de l'Afrique.

Ces stages sont animés par une formatrice professionnelle et anthropologue spécialisée dans l'analyse des stéréotypes et représentations véhiculées par les discours et les images ainsi que par un animateur de séance.

Du public visé au public touché.

Six séances de formation ont accueilli, à différents endroits de la France, 79 stagiaires d'origine géographique et culturelle différente. Mais les stagiaires n'ont pas été ceux initialement visés c'est-à-dire les participants au concours d'images ! Aucune des structures contactées, MJC, écoles d'Art, ne voyait ni l'intérêt, ni l'utilité de s'engager dans un nouveau travail commun et complémentaire puisque les auteurs des dessins s'étaient inscrits à un concours, action par définition ponctuelle et ne présageant en rien un engagement ultérieur dans une réflexion plus vaste.

Cette réaction pose d'emblée la question du suivi de ce type d'opération et interroge forcément sur le décalage pouvant exister entre ce que nous souhaitons faire en matière de sensibilisation aux solidarités internationales, le choix du public visé, bref l'ensemble des présupposés que nous pouvons aussi avoir et qui influent sur la conception des opérations, et les motivations des participants à ce genre d'action (un concours pouvait-il répondre aux objectifs généraux de la campagne ?)

Toutefois, cet échec auprès des écoles ou des MJC n'a pas empêché la poursuite de ce travail de formation, cela en le réorientant et en le proposant principalement aux membres du réseau CIMADE ou d'ONG proches de la CIMADE, après avoir testé cette méthodologie. Le livret est alors devenu un véritable support d'animation pour une approche critique de l'image.

Si la conception d'un livret pédagogique simple dans sa présentation, s'est révélée être positive quant à son utilité comme support d'animation, sa réappropriation par les stagiaires en vue d'animations qu'ils organiseraient eux-mêmes, a, pour le moment, échoué. En effet, aucun ne se sent en mesure de réutiliser ce livret et de mener localement des stages similaires.

Que dire donc en terme d'évaluation ?

L'outil existe et présente une réelle pertinence. L'action a été modifiée au cours de sa mise en oeuvre, non au regard de son thème général de promotion d'un travail sur l'analyse critique de l'image, mais parce que le public initialement visé n'a pas été touché.

L'adaptation de cette action à un autre public a permis de réaliser combien cet outil, le livret pédagogique, peut être utile en tant que support d'échanges et de débats permettant à chacun de prendre conscience des stéréotypes et représentations sur l'Afrique mais également de ceux témoignant de nos propres peurs et appréhensions à l'égard de l'Autre, celui que l'on perçoit comme différent. En effet, utiliser des images traitant d'un continent lointain, tant géographiquement que culturellement, permet d'enclencher des échanges sur des situations pourtant très proches des préoccupations et des interrogations des stagiaires. Tout en atténuant le degré d'implication personnelle contenue dans toute approche de la différence et donc en limitant les risques de blocage des stagiaires, ce livret est ainsi devenu un moyen d'aborder sous un autre angle la question du racisme et du rejet de l'Autre.

Pour des personnes souhaitant s'impliquer davantage dans une solidarité internationale réelle et active mais aussi pour des militants bénévoles ou salariés d'ONG de développement, cet outil et cette approche de l'autre peut être la première étape d'une prise de conscience des motivations profondes d'un tel engagement.

Permettre une meilleure compréhension de l'autre, de celui qu'on perçoit comme étranger, par un travail sur les représentations et appréhensions propres à chacun, est indéniablement un des moyens pouvant accroître la qualité de la relation entre les personnes et donc de la solidarité internationale, puisque être solidaire, coopérer au développement, peu importe comme on le nomme, c'est avant tout mettre en rapport des personnes, qui par définition, sont culturellement, socialement ... étrangères les unes aux autres.

Organisme : CIMADE
Adresse : 176 rue de Grenelle, 75007 Paris, FRANCE. Tél. 01 44 18 60 50. Fax. 01 45 55 72 53
Mots-clés : ART PLASTIQUE; FORMATION.
LOCALISATION : FRANCE.
Public : JEUNE; ADULTE.


Dossier
"Pour une terre d'avenir"

Réseau d'Information Tiers Monde

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