"Sahel Europe, regards croisés"

Par NICOLAS Yveline

Date de la fiche : 1997/01/01.

L'action "Sahel Europe, regards croisés" est conduite par Afrique Verte sur une durée de trois ans (1996-1998). Elle est structurée autour de l'initiative "contes croisés" et de la création d'une exposition d'art par des plasticiens du Sahel et d'Europe. Cette action, plutôt inhabituelle dans le monde des ONG de développement, repose principalement sur la volonté de mettre l'accent sur une approche interculturelle du développement.

Croiser les regards sur le monde rural.

Les thèmes abordés par cette action couvrent un champ large : le monde paysan, sa place dans la société et son avenir, ses rapports avec la ville, l'accès de chacun à la nourriture, l'abondance ou la pénurie, les dimensions culturelles des travaux et produits agricoles. Dans ce contexte thématique, la question des céréales sert de repère car presque partout dans le monde, les céréales constituent l'aliment de base, comme elles l'ont constitué aussi en Europe. Plus globalement, la sécurité alimentaire de la planète et sa capacité à nourrir ses habitants, de plus en plus nombreux, dépendent pour une large part d'une production suffisante et d'une bonne répartition du blé, du mil, du maïs, du riz, du sorgho, etc... Afrique Verte a beaucoup travaillé sur la question des céréales dans le Sahel et bénéficie d'une pratique concrète en matière d'aide aux associations paysannes du Sahel. Elle souhaite à travers cette initiative élargir son action dans une perspective "interculturelle" en montrant les points de convergence entre les sociétés, les créations propres à chacune et les transferts possibles, de l'Europe vers l'Afrique mais aussi de l'Afrique vers l'Europe. Ainsi la notion de "regards croisés" constitue le fil conducteur de l'action. Chaque thème se développe à travers une comparaison entre la réalité "ici", en Europe, et "là-bas" au Sahel. L'exposition intègre des photos, des peintures, des textes, créés par des Sahélien(ne)s et des Européen(ne)s. Chacun y exprime sa vision de sa propre réalité et de celle de l'autre.

Quatre objectifs principaux sont donc assignés à cette action.

- Montrer au public que partout les questions de la nourriture, du lien entre la faim et l'abondance, du statut et de l'avenir du monde paysan et rural revêtent un caractère essentiel.

- Restituer au problème du "développement", souvent perçu comme purement technique (ou politique ou économique...) sa dimension culturelle et artistique. Autrement dit humaine.

- Donner une possibilité d'expression supplémentaire à des artistes européens ou africains.

- Enfin promouvoir les actions de solidarité internationale et l'idée d'une coopération équitable avec l'Afrique.

Des outils itinérants adaptés à des publics variés.

Cette action vise des publics de nature diverse en Europe et au Sahel : le grand public, des écoles, des lycées d'enseignement général, des lycées agricoles et des associations concernées par les thèmes de la ruralité, de l'Afrique, de la culture. Mais aussi des galeries d'art, des instituts culturels, des festivals et manifestations culturelles, des entreprises, des comités d'entreprises, des fondations. Et enfin les décideurs politiques et économiques.

Dans une phase ultérieure, des outils spécifiques seront adaptés pour être présentés au public sahélien y compris les paysans des associations partenaires d'Afrique Verte au Niger, Burkina et Mali. Il sera intéressant de faire circuler dans les groupements villageois des expositions "photos croisés" du monde paysan "ici" et "là-bas". Cet aspect demande une préparation sérieuse, une collaboration avec des partenaires locaux, car la "communication" et l"'éducation au développement" ne sont pas facilement transposables.

Cinq catégories d'outils, tous itinérants sont réalisés ou en cours de réalisation.

- Une exposition de peintures, sculptures, et photos d'auteurs créées pour cette action. Des artistes sahéliens sont venus en France et des Européens sont allés au Sahel. De retour chez eux, chacun donne par la peinture ou la sculpture sa vision de la société de l'autre.

- Une exposition pédagogique de 22 grands panneaux comprenant des textes, témoignages, photos, schémas, illustrations collectés en particulier par des animateurs, journalistes et paysans du Niger, Burkina et Mali. Son but est de faire comprendre à des lycéens, des étudiants et des adultes les questions liées à l'alimentation et au monde paysan.

- Une vidéo "Kipsi" de 26mn, pour enfants et jeunes, tournée au Mali en pays Dogon co-produite par Afrique Verte et Arcadie qui a obtenu le prix "Droits de l'homme-reportage" décerné par la ville de Rome.

- Des catalogues d'exposition et des dossiers pédagogiques sont en cours de préparation.

- Enfin des animations ont déjà eu lieu avec des conteurs français et d'origine africaine. Elles peuvent, à ce titre, faire l'objet d'une évaluation.

Croiser l'imaginaire des sociétés africaines et européennes : l'exemple des animations avec des conteurs.

En même temps qu'Afrique Verte a sélectionné des contes sahéliens, elle a noué des partenariats en France avec des conteurs venus d'Afrique et avec d'autres, Français, ayant ou non vécu au Sahel. Il en résulte un répertoire original ayant pour thème central, la nourriture, la vie dans les villages, les travaux agricoles, la faim...Et au-delà, l'ouverture sur l'imaginaire des sociétés africaines et européennes.

Le conte permet un contact vivant et interactif avec le public -scolaire du primaire collège ou lycée, grand public, associations, bibliothèques. Issu de la civilisation rurale, il exprime l'expérience et la mémoire accumulées des sociétés, il fourmille de références aux travaux agricoles comme à la symbolique de la nourriture. Langage universel, il se recrée chaque jour, en tout lieux...car partout traditions et modernité coexistent. Liés à la vie quotidienne, ou conte "initiatique", on trouve souvent de grandes similitudes d'un continent à l'autre : cette question de la différence et de la ressemblance convient particulièrement bien aux "regards croisés".

Les premières expériences ont été concluantes. Une conteuse d'origine sénégalaise a fait une tournée de 15 jours dans les écoles primaires du Finistère, à l'initiative des groupes locaux. Cette animation a suscité un vif intérêt parmi les enseignants et les médias locaux. Plusieurs soirées de "contes croisés" ont rassemblé un public plus nombreux que les habituelles conférences-débats et projection de vidéos.

Il semble donc que ce mode de sensibilisation permette de diversifier et d'élargir l'audience habituelle, et notamment d'aller au-delà du public militant des ONG de développement. Les militants ont plus de mal que le public extérieur à entrer dans ce type "d'action nouvelle". En effet, il ne s'agit plus de communiquer pour promouvoir une association et un projet de développement, mais d'expérimenter, sans idées préconçues, une forme de dialogue avec le public, basé sur la création. Ceci peut paraître déroutant au premier abord pour certaines personnes habituées à un discours plus "idéologique".

Pour terminer on rappellera que cette action est co-financée sur trois ans, de septembre 96 à septembre 98, à 46% par l'Union Européenne, à 44% par Afrique Verte, à 10% par le Ministère de la Coopération. Le budget total s'élève à 2.800.000 FF (salaires, contributions valorisées et bénévolat inclus).

Organisme : AFRIQUE VERTE.
Adresse : 49 rue de la Glacière, 75013 Paris, FRANCE. Tél. 01 43 36 00 33. Fax. 01 43 36 67 07
Mots-clés : RENCONTRE DES CULTURES; AGRICULTURE; SECURITE ALIMENTAIRE; REALISATION D'UN OUTIL; EXPOSITION; CONTE; PROJECTION; CONFERENCE.
LOCALISATION : BRETAGNE; FRANCE.
Public : ELEMENTAIRE; COLLEGE; LYCEE; ADULTE; TOUT PUBLIC.

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Horizon Local 1997
http://www.globenet.org/horizon-local/